Carte blanche du secteur de la Jeunesse suite aux attentats de Paris

Carte blanche - 16/11/2015

Le vendredi 13 a soulevé sidération, effroi, rage et surtout incompréhension. Comment parvient-on à une telle ignominie ? Qui est assez blessé ou malheureux pour agir de la sorte ? Quels motifs peuvent mobiliser un tel déchaînement ? Quelle humanité anime les coupables ?

Suite aux dramatiques événements qui touchent, aujourd’hui, de plein fouet notre pays, le CJC souhaite vous partager la carte blanche qui avait été rédigée par le Secteur de la Jeunesse après les attentats de Paris.

Le vendredi 13 a soulevé sidération, effroi, rage et surtout incompréhension. Comment parvient-on à une telle ignominie ? Qui est assez blessé ou malheureux pour agir de la sorte ? Quels motifs peuvent mobiliser un tel déchaînement ? Quelle humanité anime les coupables ?

Les questions s’enchaînent et la plupart ne peuvent pas trouver de réponse. Pour autant nous ne sommes pas sans ressources pour comprendre pourquoi de tels faits ont eu lieu ni comment réagir.

Il faut d’abord relever pourquoi cet événement nous tétanise à ce point, et non pas les victimes des guerres actuelles. Pourquoi cet attentat nous touche et non pas celui de Beyrouth, un jour plus tôt. La réponse tient essentiellement en deux mots : identification et médiatisation. Cela s’est passé chez nous, nous aurions pu y être. Nous étions au concert au Forum ou à l’AB, nous assistions à un match de football international au stade Roi Baudouin, nous sortions tranquillement Place du vieux marché ou dans le Carré. Les victimes étaient nos voisins, nous étions avec eux, nous parlions avec eux.

La violence outrancière et la proximité de cette attaque nous émeuvent, au point de presque nous submerger et nous aveugler. Nous devons garder en mémoire qu’elle n’est « que » de nature criminelle. Elle est marginale. Elle est ponctuelle. Au quotidien, nous vivons dans la tranquillité et la quiétude. Nos pays continuent de fonctionner normalement.

Pourtant, la motivation de ses auteurs est pour partie politique. Le parcours des terroristes mêle généralement des difficultés personnelles, voire des fragilités psychologiques, et des environnements sociaux anxiogènes (chômage, décrochage, discrimination à l’embauche, criminalité, guerre). Sur ce terreau vient se couler une utopie idéologique qui leurs promet un avenir meilleur, une ascension personnelle, un épanouissement, une occasion de faire changer les choses, jusque dans l’au-delà. Mais cette motivation politique n’est qu’un catalyseur d’un contexte lui-même violent.

Pointer ces éléments nous permet de comprendre l’importance de ce contexte. Cela n’excuse en rien les individus concernés : avec les mêmes caractéristiques sociologiques, d’autres s’engagent dans la construction d’un avenir meilleur. Certes, la police doit pouvoir anticiper ces faits et y réagir. Malheureusement, une réaction de type sécuritaire ne nous conduira qu’à d’autres actes de ce type. Ce ne serait qu’une spirale, une ascension réciproque. Si nous ne changeons pas le terreau, les mêmes plantes continueront à pousser.

Il est donc absolument nécessaire d’aussi améliorer et parfois de construire la cohésion sociale, en tenant compte des places de chacun, aujourd’hui, parfois tellement loin de ce qui fait société. Il est nécessaire de travailler, chez nous et dans les pays tiers, à des démocraties plus participatives, plus solidaires, plus égalitaires, plus fraternelles. Il est nécessaire de disposer d’une éducation pointue, adaptée aux capacités de chacun et surtout davantage accessible. Le travail comme les revenus doivent être davantage partagés qu’aujourd’hui. Les mécanismes d’exclusion du chômage, particulièrement des jeunes, doivent être radicalement revus. Nous ne pouvons en effet accepter que de tels mécanismes institutionnels conduisent à de l’exclusion et, de facto, au repli identitaire ou au rejet de l’autre. Le système de santé peut être amélioré et être plus accessible. Les politiques fiscales doivent être plus justes et plus équitables. De nombreux acteurs sociaux et politiques œuvrent en ce sens, il faut continuer, accentuer et intensifier les actions comme les moyens permettant de travailler à construire cette société enfin véritablement démocratique et solidaire.

Au quotidien, au sein du secteur de la jeunesse, nous nous battons pour une société ouverte où chacun trouve sa place. Nous travaillons avec des jeunes et des enfants de tous milieux afin de leur proposer des lieux de partage, d’intégration, de participation, d’expression. Nous travaillons, en parallèle à l’enseignement, au développement des jeunes, de leurs compétences et de leur épanouissement. Nous les accompagnons dans l’acquisition d’une citoyenneté active et dans la prise de responsabilités. Au-delà des difficultés ponctuelles ou récurrentes, nous y parvenons !

Ce vendredi 13 n’est pas annonciateur d’apocalypse. Au-delà de la folie barbare et de la haine, c’est un signal d’alarme, un de plus. Nous devons en tenir compte et y réagir si nous voulons ne pas vivre, demain, dans le conflit permanent. Aussi nous en appelons aux gouvernants : il est nécessaire de proposer un contrat social et une société plus juste valorisant un vivre ensemble fondé sur davantage d’équilibre, de cohésion, de débats démocratiques et de solidarité.

De nos expériences professionnelles et de l’expérience de nos associations, nous sommes convaincus que c’est non seulement indispensable, mais aussi possible.

Benoît CESAR (Gîtes d’Etape), Bernard FAUVILLE (Auberges de Jeunesse), Stéphane HOUBION (Jeunes et Citoyen), Olivier LEBLANC (PPP la Sonatine), Benoit NICAISE et Nadia CORNEJO (Conseil de la Jeunesse Catholique), Julie BEN LAKHAL (ProjeuneS), Jérôme LECHIEN (Conseil de la Jeunesse de la Communauté française), Pierre EVRARD (Fédération des Centres de Jeunes en Milieu Populaire), Christophe COCU (Relie-F), Nadia ACHBANY (CIDJ), Antoinette CORONGIU (Fédération des Maisons de Jeunes), Christian BOGAERTS (SIEP), Logan VERHOEVEN et Catherine LEMAITRE (Comité des Elèves Francophones), Sophie STEVENS (Guides Catholiques de Belgique), Marie PESESSE et Xavier LAMBERT (Fédération Nationale des Patros), Philippe HEUSCHEN (Faucons Rouges), Jerôme WALMAG (Les Scouts), Luc MAHIEU (Scouts et Guides Pluralistes de Belgique), Brieuc WATHELET (FEF), Julien Brassart (UNECOF), Guillaume DEFOSSE (CNAPD), Mathilde SERRUYS (ASMAE), Christian BOILS (Coordination-CRH), Emilie DELCOURT (JOC), Laurent TOUSSAINT (Service d’Education et de Formation Populaire), Marc FANUEL (Arc-En-Ciel), Vincent BURON (Résonance), Ludovic VOET (Jeunes CSC), Jean-Louis VERBRUGGEN (CHEFF), Jean-Philippe CALMANT (Maison de Jeunes le Cerceau), Geraldine FIEVEZ (AMO La CROISEE), Georges NIHOUL (BAO-Jeunesse), Damien LEFEUVRE (AMO CARS), Xavier MANCHE (Conseil Jeunesse Développement), Marilyn LIENART et Laetitia VIGNAUD (GRATTE), Olivier GERKENS (Coala), Laurence ROUFFART (Tilt-Odyssea), Stéphane HEURTER (Ego-Logique), Héloïse ROUARD (Action Ciné Medias Jeunes), Jeanne-Marie SEVAUX (Club de Jeunesse des Marolles), Xavier HUTSEMEKERS (Maison de Jeunes la Baraka), Benjamin ANCIAUX (BE LARP).

Les signataires agissent à titre personnel.

Contact presse
Benoit César
0479/39.37.87